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Sommaire
Interview avec notre auteur, Nöel Pellerin
J’ai lu dans votre notice biographique que vous êtes un ex fonctionnaire de carrière spécialisé dans la conception de politiques publiques et que vous avez exercé un rôle d’économiste conseil auprès de l’exécutif du gouvernement du Québec.
1) Qu’est-ce qui vous a amené à publier un premier roman-essai ?
J’ai toujours aimé lire et écrire. Professionnellement, j’ai écrit quantité de notes de services et de rapports gouvernementaux.
2) Votre parcours professionnel vous destinait sans doute davantage à produire un essai sur la chose publique. Pourquoi un roman-essai ?
Je trouvais limitant ou contraignant d’écrire sur le ton neutre de l’administration. Dans mes loisirs, j’écrivais pour mon plaisir des histoires mettant en scène des personnages évoluant dans le milieu de la politique et de la fonction publique. L’écriture littéraire offre beaucoup plus de possibilités de s’exprimer librement.
3) Pourquoi avoir attendu tout ce temps avant de publier ?
Honnêtement, je croyais que ce n’était pas pour moi, que le milieu des écrivains n’était pas le mien.
4) Comment en êtes-vous venu à vous lancer tout de même ?
Des collègues de travail me disaient que j’écrivais bien, que j’avais une « bonne plume ». Ces compliments m’étonnaient. C’est vrai que j’avais le souci d’être compris et qu’il m’importait d’employer les mots justes mais comment un fonctionnaire contraint à l’écriture « drabe » pouvait-il avoir une « bonne plume ». Puis, j’ai fait lire à des membres de ma famille et à des amis mes premières tentatives d’écrits littéraires. Leurs commentaires favorables m’ont encouragé.
5) Concrètement, comment est né L’écritoire ?
Ce fut un long cheminement. Il y sept ans environ, j’en ai proposé une première version à des maisons d’édition de renom. Elles l’ont refusé en invoquant généralement que cela ne cadrait pas avec leur politique éditoriale mais leur lettre de réponse soulignait tout de même des points positifs. J’ai retravaillé et enrichi mon ouvrage au cours de la dernière année et j’ai eu recours aux services d’accompagnement des Éditions Amalthée.
6) Au fait, c’est quoi une écritoire ?
Une écritoire est un petit coffret contenant tout ce qu’il faut pour écrire. J’en ai élargi l’aire sémantique, dans un registre plus poétique, en y associant tout ce dont a besoin mon personnage principal pour écrire sur son tableau noir : le lac, la forêt, le ciel et les animaux sauvages.
L’écritoire réfère aussi au livre-écritoire, une nouvelle catégorie littéraire inventée dans le roman et destinée à compenser la perte d’écriture résultant du décès de Réjean Ducharme. Un livre-écritoire permet aux écrivains dits de relais de modifier à leur guise ledit livre, voire de le réécrire de but en blanc.
Le décès de Réjean Ducharme a donc été l’un des principaux déclencheurs de l’écriture du roman et l’écritoire ainsi défini est un élément important du roman.
L’histoire centrale du roman demeure toutefois l’ascension sociale de mon personnage principal Claire Endoute, dite Dout, jusqu’au Manoir des Immortels, un club privé de milliardaires présumément mécènes, où elle accède à un poste de pouvoir lui permettant de poursuivre sa quête de « sauver le monde et le rendre heureux ».
7) Et, pourquoi le sous-titre la Loi du Bonheur ?
La loi du bonheur est l’élément central de la dimension essai sur la chose publique.
C’est le titre d’un essai écrit par un économiste devenu l’ami de Dout. Il y propose d’enchâsser dans une loi une réforme en profondeur de la démocratie libérale et en particulier du processus de conception et évaluation des politiques publiques.
8) Quels sont vos sources d’inspiration, votre façon de travailler ?
Je réagis beaucoup à l’actualité lorsqu’elle heurte mes valeurs, mes convictions. C’est un peu le même type de réaction que j’avais comme économiste-conseil lorsque j’étais au gouvernement. J’aimais bien faire ce que j’appelais du « damage control » au regard de projets que je considérais parfois insensés.
Je crois au phénomène de l’inspiration. Les idées me viennent souvent par périodes, la nuit ou au petit matin. C’est comme si le cerveau travaillait la nuit pour résoudre une impasse d’écriture ou corriger une formulation quelque peu boiteuse. Je prends parfois quelques notes en pleine nuit sur mon cellulaire par crainte que ce que je considère être des idées valables ne s’évaporent le jour venu.
9) Vos personnages portent tous un surnom qui reflète leur personnalité, comme Dout et Sûr, ou leur situation, comme Duriche. Cela ne correspond pas aux codes habituels d’écriture. Pourquoi ce choix ?
J’aime les personnages bien campés tels ceux que l’on retrouve par exemple dans « Un homme et son péché », le roman de Claude-Henri Grignon. Cela permet aussi au lecteur de bien situer les personnages en tout début de lecture. Surtout, j’ai fait ce choix en pensant à Dout, mon personnage préféré. Cela m’ouvrait la voie pour commenter les vertus que j’associe au doute, porteur de curiosité et d’apprentissage. Il me permettait aussi de critiquer son contraire, Sûr. J’abhorre les ignorants trop sûrs d’eux-mêmes, les gérants d’estrade. Ce livre est d’ailleurs un exutoire aux choses qui m’irritent ou que je déteste carrément.
10) Vous communiquez fréquemment avec ceux que vous appelez les auteurs de relais, conformément à votre concept de livre-écritoire, et, surtout avec votre lecteur fétiche que vous surnommez Lect. Cela confère à votre ouvrage une dimension interactive mais cela contrevient, encore ici, aux codes habituels d’écriture. Pourquoi ces choix ?
J’établi dans le prologue que, parfois, je me regarderai en train d’écrire ou donnerai mon avis. J’utilise alors les caractères italiques. Par exemple, j’exprime l’hésitation que j’ai eu en cours d’écriture entre poursuivre mon ouvrage ou faire un tour de vélo par une belle journée de début d’automne. J’y vois un « glissement complice » avec le lecteur. J’accentue ce « glissement » lorsque je suggère aux auteurs de relais de modifier un passage ou que je m’adresse à Lect, lequel décide de me répondre ou non. J’utilise dans ces derniers cas les caractères italiques entre crochets.
11) Votre livre est aussi teinté d’humour, même dans la portion essai. Était-ce bien nécessaire ?
Oui, pour moi en tout cas. J’aurais perdu en bonne partie mon intérêt à écrire si j’en était revenu au ton de l’écriture administrative qui m’a tant pesé au cours de ma carrière de fonctionnaire. Parfois, il ne s’agit que de petites blagues mais cela me gardait dans le coup. Je suis assez bon public pour l’humour. Il porte une exagération qui tranche avec le discours aseptisé ambiant, au Québec à tout le moins. J’espère que les lecteurs ressentiront le même effet.
12) Quels sont vos motivations principales, vos messages ?
Ce n’est pas d’en vendre beaucoup. Dans l’écritoire, je m’indigne face à l’insoutenable légèreté de la chose publique. Je dénonce le jeu politique, l’inclination des élus à satisfaire leurs intérêts personnels, les libertés individuelles excessives, le manque d’intervention gouvernementale sur les défaillances de marché, le laissez-faire éhonté face à la crise climatique, les politiques publiques improvisées et intéressées et l’utilisation des fonctionnaires comme simples exécutants des volontés des élus.
13) Pour terminer, avez-vous d’autres projets ?
L’écritoire se termine par un point d’interrogation quant aux chances de réussite de Dout de « sauver le monde et le rendre heureux » au sein du Manoir des Immortels. Le dirigeant du club privé de milliardaires est énigmatique et a défini sa mission de façon un peu nébuleuse, sous le nom de code X-SMRH. Il pourrait donc y avoir une suite à l’écritoire, sous le titre « Le gel ». Je n’en dis pas plus.
L’écritoire se prêterait aussi à mon avis à la réalisation d’un film.
Enfin, je pourrais commercialiser un jeu de société que j’ai titré « Assainir le monde ».
Pour commander le livre : https://www.editions-amalthee.com/librairie/lecritoire/